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Déduction pour gain en capital dans le cadre d’un transfert d’entreprise familiale

BJC

Le gouvernement fédéral ressert les conditions pour les transferts intergénérationnels d’entreprise et prévoit des modifications au Projet de loi C-208 à compter de 2024.

Article publié le 23 octobre 2023

Lors de l’annonce de l’adoption du projet de loi C-208, initialement voté en juillet 2021, le gouvernement fédéral avait évoqué certaines réserves quant aux possibilités d’abus qu’offraient ces nouvelles dispositions suggérées de la Loi de l’impôt. Dans le budget fédéral 2023, le gouvernement fédéral a proposé des modifications afin d’éliminer certaines failles que présentait le texte initial. Les propositions visent à conserver l’objectif de faciliter le transfert intergénérationnel véritable tout en prévenant l’évasion fiscale.

Voici un résumé des nouvelles conditions qui devront être remplies pour pouvoir bénéficier de cet allègement à compter du 1er janvier 2024.

Véritable transfert intergénérationnel

À titre de rappel, le projet de loi C-208 visait initialement à faciliter le transfert d’entreprise intergénérationnel. Avant son adoption, certaines restrictions empêchaient les entrepreneurs de demander l’exonération cumulative pour gain en capital lors de transfert d’entreprises à des générations futures. Ces règles avaient comme effet de donner lieu à un dividende réputé pour le vendeur plutôt qu’un gain en capital lors de transactions en faveur d’une personne ayant un lien de dépendance. Ainsi, avant cette proposition, le transfert d’une entreprise à la relève familiale était très punitif pour un entrepreneur comparativement à la vente à un tiers.

Selon les modifications législatives, afin que la vente des actions à une personne liée soit admissible à l’exonération pour gain en capital, il doit s’agir d’un « véritable » transfert intergénérationnel. Pour les autorités fiscales, un véritable transfert intergénérationnel a lieu lorsque le contrôle de l’entreprise est entièrement transféré à l’acquéreur et que le vendeur n’a plus d’intérêt économique ni de participation à la gestion et aux opérations de l’entreprise. De plus, le nouveau propriétaire doit avoir l’intention de poursuivre l’exploitation de l’entreprise pour une période significative après le transfert.

De surcroît, les conditions suivantes doivent être remplies :

  1. Le parent (et/ou son conjoint(e)) n’a jamais demandé après 2023 d’exception relativement aux nouvelles règles d’un transfert d’entreprise familiale.
  2. Les actions de la société transférée doivent se qualifier d’actions admissibles de petite entreprise ou d’une société agricole et de pêche familiale;
  3. La majorité des actions votantes et participantes doit être transférée au moment de la vente;
  4. Le transfert doit être effectué en faveur d’une société contrôlée par l’une ou des personnes suivantes âgées de 18 et plus :
    • Les enfants du contribuable;
    • Les petits-enfants;
    • Les enfants du conjoint;
    • Les conjoints des enfants;
    • Les neveux et nièces;
    • Les petits-neveux et petites-nièces.

Suivant le moment de la vente initiale, si le parent conserve une portion des actions votantes ou participantes, il dispose d’une période de 36 mois pour compléter le transfert de son solde d’actions restantes (sauf pour des actions privilégiées sans droit de vote). Il est fortement recommandé de transférer la totalité des actions participantes dès la vente initiale afin d’éviter des problématiques importantes.

 Transferts immédiats et graduels

Afin d’offrir plus de souplesse aux contribuables qui souhaitent se prévaloir des allègements proposés, deux situations seront désormais visées par le projet de loi C-208, soit le transfert immédiat ou un transfert progressif.

Voici un tableau qui compare les différentes conditions des deux situations proposées :

Transfert intergénérationnel d’entreprise

Transfert immédiat
Transfert progressif
Période visée pour achever le transfert d’entrepriseMaximum de 3 ansEntre 5 et 10 ans
Transfert du contrôleLe parent ne doit pas détenir le contrôle de droits de vote ni le contrôle de fait de la société suivant la transaction.Le parent ne doit pas avoir le contrôle des droits de vote suivant la transaction.
Transfert des intérêts économiquesLe transfert du solde des actions votantes et participantes du parent doit être effectué dans un délai de 36 mois (il est fortement recommandé de transférer la totalité des actions participantes dès la vente initiale afin d’éviter des problématiques importantes).Le transfert du solde des actions votantes et participantes du parent doit être effectué dans un délai de 36 mois.

Au plus tard 10 ans après la transaction, la valeur de la participation du parent (dette et actions privilégiées ) ne doit pas dépasser 50 % de la valeur de l’entreprise au moment du transfert pour les entreprises agricoles ou de pêche et 30 % pour les autres sociétés exploitant une petite entreprise.
Transfert de la gestion de l’entrepriseL’enfant doit avoir le contrôle de la gestion de l’entreprise dans un délai raisonnable suivant la vente.L’enfant doit avoir le contrôle de la gestion de l’entreprise dans un délai raisonnable suivant la vente.
Maintien du contrôle par l’enfantL’enfant conserve le contrôle de la société pendant une période de 36 mois suivant le transfert.L’enfant conserve le contrôle de la société pendant la période la plus élevée entre 60 mois ou jusqu’à ce que le transfert soit achevé.
Participation active dans l’entrepriseAu moins un enfant doit maintenir une participation active dans l’entreprise pendant 36 mois suivant le transfert d’actions.Au moins un enfant doit maintenir une participation active dans l’entreprise pendant la période la plus élevée entre 60 mois ou jusqu’à ce que le transfert soit achevé.
Délai de prescription3 ans supplémentaires à la période « normale ».10 ans supplémentaires à la période « normale ».

 

Ces conditions s’ajoutent à celles énoncées précédemment. Ainsi, malgré que le transfert soit désigné comme étant « progressif », le parent doit tout de même transférer la majorité des votes et de la participation au moment de la transaction. Le solde des actions votantes et participantes doit être disposé dans un délai de 36 mois, et ce, peu importe l’option choisie.

Autres modifications

L’enfant et le parent devront conjointement produire un choix l’année du transfert et seront solidairement responsables de tout impôt supplémentaire payé par le parent en raison du non-respect des conditions énoncées ci-dessus.

Les modifications annoncées prévoient aussi l’annulation de la mesure prévoyant initialement la réduction progressive du montant d’exonération cumulative des gains en capital pour le vendeur dans les cas où le capital imposable de la société se trouvait entre 10 et 15 millions de dollars pour l’ensemble des sociétés associées du groupe.

Harmonisation provinciale

Le gouvernement provincial a annoncé dans son bulletin d’information du 27 juin 2023 qu’il s’harmonisera à la législation fédérale à compter du 1er janvier 2024.

Ces règles sont nouvelles et plusieurs précisions sont attendues. Notre équipe en fera la vigie.

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